Passé

La collection continue

Exposition collective

10.11.2004 – 31.12.2004
Bastia

J'ai des yeux, de vrais yeux,          
Des yeux vivants, des yeux de flamme,     Des yeux merveilleux...*

*Coppelius. Offenbach, Les conies d'Hoffmann, Acte I scene 4.

II y a trois ans déjà, la Corse perdait en quelques heures une part importante de son patrimoine vivant : 96 œuvres du Fonds Régional étaient
détruites dans l'incendie des réserves à Corte ; soit les deux tiers d'une collection remarquable et réputée tant pour ses choix exigeants, la valeur historique de certaines pièces majeures, que pour ses axes prospectifs.

Grâce aux artistes qui ont été nombreux à se mobiliser pour que la collection revive, grâce aussi aux engagements ténus des tutelles du FRAC - Collectivité Territoriale de Corse et Ministère de la Culture- et au travail de réflexion et de médiation du comité scientifique et technique, près de soixante œuvres ont été pensées et acquises pour la reconstitution (toujours en cours) d'un ensemble fort et cohérent.

Certaines pièces ont été re-créées par les artistes, d'autres ont été proposées après concertation afin de prolonger, voire de conforter la présence de leurs auteurs dans la collection, et de maintenir une même lisibilité de l'histoire conforme aux missions et au projet de l'institution. Un projet qui n'a cessé de se préciser et de se développer, en prenant en compte les réalités du terrain, les besoins identifiés et les potentialités, avec notamment des commandes aux artistes réalisées aux cours de résidences et des moments de dialogues a l'occasion de la diffusion des œuvres.

Cette exposition au Centre Culturel Una Volta a pour but de restituer au public de Corse, autant qu'il est possible actuellement, la jouissance de ces œuvres et de rendre visibles des orientations fondamentales de la collection. Celle-ci peut être abordée diversement selon ses axes historiques et les thématiques qui créent un lien transversal entre différentes périodes de sa constitution.

LA COLLECTION CONTINUE ; c'est un projet et c'est une situation.

L'exposition comprend 24 pièces : certaines acquises depuis plusieurs années, d'autres récemment.

Le propos s'articule autour et à partir de la question environnementale, centrale et de ce qui fait œuvre : le point de vue des artistes.

La nature s'est imposée contextuellement : lieu d'invention, de projection intellectuelle, de doutes, d'anéantissement amoureux ou mystique, de perdition des repères et de retours aux sources mais aussi d’interrogation et de rencontre avec soi-mêrne, de spéculations dénoncées. Regardée, distanciée, elle est paysage et, du coup, cette vision s'ouvre aussi sur les transformations du monde. Constamment, dans l'histoire de l'art, le paysage est le lieu de projection et de représentation du lien entre l'individu et sa culture ; rural ou urbain, il contient et révèle les éléments de l'iconographie contemporaine. Ces signes augmentent à mesure que sont intégrées (comprises) les réalités modernes et la conscience que les sociétés en ont.

Les artistes n'énoncent ni message ni slogan ; ils proposent et, s'ils mettent en évidence, c'est par une approche inventive du réel qui entraine le spectateur dans une réflexion active. Elle permet de partager et d'analyser une culture commune.

Les œuvres interrogent aussi les formes de l’art : peinture, sculpture, photographie, vidéo, dessin ... les frontières sont largement dépassées. " L’œuvre d'art moderne se donne comme une réalité à expérimenter et à vivre " (1)

Certaines pièces sont des environnements, elles peuvent troubler le spectateur par des rapports d'échelles et des relations inédites interieur­exterieur. Cette liberté, les artistes peuvent, de même, la suggérer en intégrant à l'œuvre, et sur un seul indice, l'espace de l'exposition.

Le temps est le présent, c'est celui de l’échange.

Anne Alessandri Commissaire de ('exposition

(1) Nicolas BOURRIAUD - Formes de vie - ed. Denoel 1999.